| L'histoire du château
 Moncontour, place-forte 
              de Penthièvre.
 
  Une 
              fois la situation stabilisée, les architectes de Clisson 
              pansent les plaies de leurs places et, si les travaux reprennent, 
              de nouvelles directives sont données. Les progrès 
              de la poliorcétique avec le développement de l'artillerie 
              peu avant 1400 modifient progressivement mais considérablement 
              les concepts d'architecture militaire et imposent désormais 
              des réalisations différentes. Les guerres ont révélé 
              la nécessité de conserver des espaces libres entre 
              le rempart et les constructions, souvent privées, édifiées 
              anarchiquement lors des périodes de paix. On a ainsi recours 
              à certaines expropriations, telle celle d'une femme dépossédée 
              de son terrain afin de permettre l'aménagement de jardins. 
              Surtout, la nécessité de rendre les remparts résistants 
              aux pilonnages de l'artillerie donne naissance à un nouveau 
              type de rempart, moins élevé et plus épais. 
              Les vieilles murailles sont écrêtées vers l'intérieur 
              où des remblais viennent renforcer leur résistance 
              sur une hauteur maximale. Ces " remparements " bouleversent 
              parfois la conception interne de la place en condamnant certaines 
              zones urbanisées et certaines issues vers l'extérieur. 
              C'est probablement ce remparement des murailles Nord-Est de la ville 
              qui provoque la condamnation de l'issue par la porte ogivale donnant 
              sur le Point-du-Jour, enfouie désormais sous plusieurs mètres 
              de remblais. 
 A cette époque également, le tracé du rempart 
              primitif au Nord est abandonné. Le nouveau rempart est porté 
              au-delà du massif rocheux. De nouvelles tours, davantage 
              espacées les unes des autres, sont édifiées 
              en forte saillie sur la courtine, à l'intérieur desquelles 
              des espaces aménagés dans l'épaisseur des murs 
              permettent la mise en place de couleuvrines qui renforcent considérablement 
              la protection des courtines ; les " pertus " de canonnière 
              apparaissent désormais sur les fortifications, se substituant 
              aux archères sur les anciennes tours, et l'on n'hésite 
              d'ailleurs pas à aménager davantage de canonnières 
              que l'on ne possède réellement de canons car, si toutes 
              ne sont pas armées, du moins l'assaillant pourra-t-il en 
              douter et pourra-t-on le faire le cas échéant. L'utilisation 
              généralisée de l'artillerie révèle 
              encore la fragilité des angles droits, imposant la prépondérance 
              du plan circulaire ou apparenté puis des angles brisés. 
              L'édification de la tour du Moinet, seul modèle de 
              tour à canon à Moncontour, complète le dispositif 
              du nouveau rempart. Au début du XVe siècle, les tensions 
              entre le parti de Penthièvre et l'administration ducale imposent 
              le maintien des ateliers qui perfectionnent encore le dispositif 
              défensif de la ville après son entrée dans 
              le domaine ducal en 1410 qui lui vaut par ailleurs d'être 
              épargnée par les programmes de démilitarisation 
              de 1420.
 
 Les archives du XVe siècle ne mentionnant aucune véritable 
              construction, hormis celle de la tour Mognet et celle de la demi-lune 
              de la porte d'En-Haut, la ville possède à cette époque 
              la forme qu'elle conservera à travers les siècles 
              suivants. Jusqu'à la fin du XVe siècle, l'absence 
              de conflit sur le sol breton profite à l'économie 
              qui procure aux villes castrales les moyens financiers nécessaires 
              à l'exécution des gros travaux. Dans le budget global 
              de Moncontour, ceux-ci représentent alors plus des trois 
              quarts des dépenses alors qu'une faible partie est destinée 
              à l'artillerie, le reste (un cinquième) assurant à 
              hauteur égale les gages, les rabats de fermes et des dépenses 
              diverses comme l'indemnisation des victimes.
 
 
  Place-forte 
              ducale, Moncontour est particulièrement visée dans 
              le conflit opposant pour la première fois la Bretagne à 
              un ennemi extérieur, le royaume de France dont les volontés 
              expansionnistes s'affichent au lendemain du départ des anglais 
              du sol continental auquel les bretons ont d'ailleurs largement contribué. 
              Dans le dernier quart du XVe siècle, les souverains français 
              s'acharnent contre leurs " vassaux " et l'isolement du 
              duché par rapport à son allié bourguignon leur 
              permet d'y effectuer une série de trois campagnes peu glorieuses, 
              du moins victorieuses. Au cours de l'agression française 
              (1487-1489), la ville fait comme toutes les autres places-fortes 
              de Bretagne l'objet des enjeux d'un parti et de l'autre. 
 La première campagne (1487) donne lieu à trois attaques 
              dont deux dès le mois de juin. Au cours de ce mois en effet, 
              Pierre de Rohan, commandant pour le parti français, aborde 
              le Penthièvre et, profitant de l'absence de Roland Gouicquet, 
              capitaine de Moncontour pour François II, attaque la ville 
              qu'il investit avec une facilité étonnante. Certes, 
              l'armée française est mieux organisée et mieux 
              armée aussi que l'armée bretonne ; celle-ci au contraire 
              n'est pas préparée à de tels combats et surtout, 
              plus que tout même, l'autorité ducale se disloque en 
              plein conflit, minée par la corruption et les trahisons secrètement 
              introduites et encouragées par la France depuis plusieurs 
              années. Toutefois, la contre-attaque ne tarde pas. Les français 
              à peine installés dans la cité y sont à 
              leur tour assiégés dès le 24 juin lorsque, 
              venant de Quintin, Jehan de Coëtmen se présente avec 
              5.000 hommes devant Moncontour et pose le siège pour plusieurs 
              jours. Périodiquement, les canons de l'armée ducale 
              battent les points stratégiques des fortifications et à 
              plusieurs reprises, après qu'un pilonnage intensif a momentanément 
              bouleversé la défense française, ses troupes 
              se lancent à l'assaut de la place avant d'être finalement 
              repoussées. Au terme de plusieurs tentatives infructueuses, 
              et ne pouvant laisser davantage Nantes à la portée 
              des français, Coëtmen décide d'abandonner le 
              siège de Moncontour pour ramener ses troupes auprès 
              de la capitale bretonne. Le siège est levé le 5 juillet. 
              Mettant à profit la décomposition de l'armée 
              française le mois suivant, François Tournemine surprend 
              Moncontour qu'il parvient à investir, sans que l'on ait davantage 
              d'informations sur la manière dont cette (re)prise s'est 
              déroulée. Quoiqu'il en soit, la ville devient une 
              base importante pour les troupes ducales dans l'évêché 
              de Saint-Brieuc où sont rassemblés troupes, armes, 
              munitions et ravitaillement qui lui permettent de demeurer en possession 
              du parti ducal jusqu'à la troisième campagne.
 
 La campagne fulgurante de douze mille soldats franco-bretons à 
              travers le duché en janvier 1489 voit ceux-ci, venant de 
              Montfort, se présenter le 17 devant Moncontour dont Gouicquet 
              est une nouvelle fois absent. Les pièces d'artillerie emmenées 
              de Saint-Malo sont mises à contribution pour battre le rempart 
              et la garnison en place, désemparée, isolée 
              et incapable de résister davantage à un assaillant 
              démesuré, ne peut qu'abandonner toute résistance. 
              La ville n'est restituée au parti breton qu'avec la reddition 
              du duc.
 
 Aussitôt Moncontour est pressentie par l'administration ducale 
              pour des projets de cantonnement de troupes alliées, tous 
              avortés, témoignant néanmoins de l'intérêt 
              de sa situation. Cédée par Anne au Prince d'Orange, 
              la place connaît en cette fin de XVe siècle une importante 
              campagne de restauration dont la responsabilité est confiée 
              à Gilles de Kermené et nécessitant la mise 
              en place d'une fiscalité particulière. Les comptes 
              de Jehan de Bréhand révèlent que l'on assiste 
              à l'augmentation considérable de la diversification 
              des allocations budgétaires au détriment des gros 
              travaux qui ne représentent plus que 47% des dépenses 
              ; l'artillerie représente en effet 12,5%, les gages 3,5%, 
              les rabats de fermes 2,5% et surtout des frais divers 34,5%.
 Page 
              précédente - Page 
              suivante |